Régions de France a inauguré le 1er décembre dernier son bureau permanent à Bruxelles. Pierre-Édouard Altieri*, directeur de la stratégie européenne de Régions de France à Bruxelles, qui le pilotera, expose à Localtis les objectifs de cette présence bruxelloise.
Localtis – Quelques jours avant la présidence française du Conseil de l’Union européenne, Régions de France a ouvert son propre bureau à Bruxelles, où chaque région française dispose déjà de sa propre antenne de représentation et où siège le Comité européen des régions. Cette présence physique, tardive, était-elle vraiment indispensable au moment même où la visioconférence a pris son envol ?
Pierre- Édouard Altieri – Il ne fait pour moi aucun doute qu’il est essentiel d’être physiquement présent à Bruxelles, que ce soit pour être visible, bien informé, constituer des relais, peser sur les décisions… Les retours que je reçois depuis cette ouverture confortent cette position. À chaque fois ou presque, je fais face aux mêmes réactions : d’étonnement pour mes interlocuteurs les moins avertis, qui n’imaginaient même pas que nous n’y étions pas déjà implantés. Et de soulagement chez les spécialistes : « Enfin ! », soupirent-ils. Il est clair que ce bureau comble un manque. D’ailleurs, la question que l’on me pose le plus souvent, c’est « Pourquoi pas plus tôt ? ». S’il ne m’appartient pas d’y répondre, une chose est sûre : il n’est jamais trop tard pour bien faire ! Je relèverai encore que le fait d’être absent de Bruxelles est plutôt propre aux associations d’élus françaises. Leurs homologues de nombre d’États membres – l’Allemagne, l’Autriche… – y sont, elles, solidement implantées. Sûrement pas par hasard ! Comme l’a rappelé Renaud Muselier lors de l’inauguration du bureau, pour nous, l’objectif est clair : obtenir plus de crédits européens et avoir une influence directe sur le processus législatif européen.
Le fait que la France prenne la présidence du Conseil en janvier a sans doute pesé ?
Sans nul doute. L’idée de ce bureau a toutefois germé lorsque Renaud Muselier présidait Régions de France. Ancien député européen, il connait les rouages de la machine européenne et mesure l’importance d’une présence dans les cénacles bruxellois. La présidence française, mais aussi plus largement la nouvelle programmation 2021-2027, constituaient des arguments supplémentaires. Au sein de Régions de France, l’unanimité s’est faite sans difficulté sur la nécessité de ce bureau. Je n’ai ainsi aucun doute sur le fait que cette antenne sera politiquement portée par l’ensemble des régions, car l’intérêt est partagé. Carole Delga a su parachever l’opération. Nos bureaux sont d’ailleurs situés au sein de la maison de la région Occitanie.
Quels seront vos effectifs et comment entendez-vous exercer avec les représentants des régions déjà en place ?
Dans un premier temps, je serai seul à Bruxelles. L’idée n’est évidemment pas de travailler dans son coin, mais bien de coopérer avec l’ensemble des représentants des régions françaises à Bruxelles – ils sont environ 80. Parfois, les régions ont intérêt à défendre leurs dossiers chacune de leur côté, dans le cas des appels à projets par exemple. Mais elles ont aussi souvent intérêt à parler d’une seule voix, et il nous reviendra alors de la porter haut et fort. C’est le cas, par exemple, dans le cadre de la mise en œuvre du plan de relance ou du pacte vert. Nous travaillerons singulièrement ensemble sur le fonds social climat, et plus largement sur le paquet « Fit for 55 » (voir notre article du 15 décembre 2021). Régions de France collaborera naturellement étroitement avec le Comité européen des régions, notre premier partenaire. Je me réjouis d’ailleurs que l’événement le plus important de la présidence française sera le sommet des villes et régions d’Europe, rendez-vous phare du Comité des régions, qui se tiendra à Marseille les 3 et 4 mars prochains.
Quels sont les dossiers que vous entendez particulièrement porter durant la présidence française ?
Outre les sujets précédemment évoqués, la réserve d’ajustement au Brexit est un dossier que nous suivons de près. Le Brexit a en effet touché l’ensemble des régions françaises, et la question de l’allocation des fonds par l’autorité de gestion – l’Agence nationale de la cohésion des territoires – reste à ce jour posée, alors qu’aucune répartition régionale n’a été prévue. C’est une question à 350 millions d’euros ! Les régions françaises sont également extrêmement attachées au respect du parlement de Strasbourg, particulièrement malmené ces derniers mois, et devant lequel le président Macron doit s’exprimer le 19 janvier prochain. Autre dossier qui nous mobilisera ces prochaines semaines, la publication à la fin du mois du huitième rapport sur la cohésion de la Commission européenne, qui devrait donner de nouvelles pistes. Par ailleurs, avec l’ouverture de la réserve électorale en mars, qui corsètera la parole de l’Administration, la France pourra compter sur ses régions pour relayer ses messages auprès des institutions européennes.
* Pierre-Édouard Altieri, titulaire d’un master d’études européennes de l’université de Göteborg et d’un master d’études politiques et administratives du Collège d’Europe, a notamment été assistant parlementaire au Parlement européen et ancien conseiller aux affaires européennes du président de la région PACA, Renaud Muselier.