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RÉGION : Nouvelle-Aquitaine
29 février 2024

Nouvelle-Aquitaine : quand élevage rime avec agroécologie

Parfois pointée du doigt comme une activité agricole polluante, la filière de l’élevage apporte aussi des solutions : maintien des prairies qui captent le CO2, production de qualité, élevage extensif, diversification de l’usage des terres

 

Le premier problème auquel est confrontée cette filière est celui de la juste rémunération. Elle subit en parallèle de fortes demandes extérieures sociales, sur fond d’enjeux environnementaux et, plus encore, sur les questions de bien-être animal. La filière se retrouve dans l’obligation d’évoluer, avec des agendas politiques tels que la demande de réduction de 50 % des gaz à effet de serre d’ici à 2050, soit une exigence très difficile à tenir pour ce secteur», estime Jean-Louis Peyraud, directeur de recherche à l’Inrae, spécialiste de la production laitière, qui préside l’Animal Task Force, groupe européen de réflexion sur la place de l’élevage dans l’agriculture de demain.

 

L’élevage est souvent pointé du doigt pour ses émissions de gaz à effet de serre, notamment de méthane, pour ses bilans carbone élevés, ses impacts sur la déforestation, sa gestion des effluents, ses rejets dans les milieux aquatiques et le mal-être animal.

 

Sur ce point, il convient de nuancer et de faire la différence, par exemple, entre les élevages intensifs et démesurés aux États-Unis ou au Brésil et l’élevage à l’herbe du Limousin. Le chercheur de l’Inrae ajoute: « Les méthodes actuelles d’évaluation ne quantifient que les impacts négatifs, sans prendre en compte les services rendus par l’élevage. C’est pourtant un secteur qui crée plus d’emplois que les grandes cultures, qui permet de faire vivre des territoires isolés et peu cultivables et qui, sur un plan environnemental, est vecteur de diversification de l’usage des terres, de fertilité des sols, du maintien de prairies, qui permettent de stocker du carbone, ou de haies, elles-mêmes sources de biodiversité» 

 

Revenir à un élevage herbager et pâturant

 

Grâce à ses atouts, le secteur de l’élevage disposerait ainsi d’alternatives qui permettraient en France de réduire de moitié, selon Jean-Louis Peyraud, les émissions néfastes générées par la production de viande. D’ores et déjà, nombre d’éleveurs néo-aquitains se sont lancés. « On assiste actuellement à une forte conversion vers l’agroécologie de la part des éleveurs laitiers, ceux s’orientant vers le bio. Pour autant, cela reste complexe pour faire changer l’ensemble de la filière », estime Xavier Barat, formateur et conseiller en agriculture écologique, gérant de la Scop Innov-Eco2, qui accompagne les éleveurs de bovins et ovins allaitant.

 

Selon cet agronome et économiste, de fait, le retour à un mode de conduite des prairies par le pâturage rend tout à fait possibles des bilans carbone neutres. « Actuellement, la majorité des éleveurs fait du pâturage, mais seuls 10 % en ont une bonne gestion.

 

Les temps de pâturage sont souvent limités au printemps, à 120 jours environ. Le cycle positif, ce serait de rallonger les périodes de pâturage, ce qui implique d’augmenter les surfaces en prairies accessibles au pâturage et de les gérer prioritairement en pâturage tournant, en les subdivisant pour assurer un temps de repos favorable à la repousse de l’herbe. » Les bénéfices en seraient économiques et environnementaux, les éleveurs réduisant la quantité comme le coût de divers intrants tels que les grains ou concentrés alimentaires, les engrais chimiques et les frais de mécanisation pour de la production fourragère.

 

Favoriser les échanges entre éleveurs et agriculteurs

 

« Dans ces prairies, le fumier des animaux favoriserait de plus la fertilité des sols, permettant des cultures en autonomie, et rendrait les sols plus résistants à la sécheresse », ajoute Xavier Barat. Ces prairies exploitées par le pâturage ont un rôle essentiel à jouer pour restabiliser les sols dans des zones par exemple trop céréalières, réintroduire de l’élevage dans les régions où il a disparu.  

 

La première des solutions qui s’impose réside dès lors dans la recherche de complémentarités entre éleveurs, agriculteurs, producteurs de grains à l’échelle d’un territoire, selon les ressources et les problèmes de chacune de ces zones. « Il faut recréer une circularité, par exemple développer les cultures de légumineuses et d’oléoprotéagineux comme le tournesol pour éviter les importations de soja, favoriser la fixation symbiotique de l’azote de l’air plutôt que de nécessiter des engrais minéraux ou des espèces peu gourmandes en eau» 

 

Soutenir les investissements

 

Les éleveurs peuvent également recourir à d’autres leviers, nécessitant des investissements plus importants: unité de méthanisation, récupérateur de gaz dans des bâtiments abritant de l’élevage de porcs, nouvel équipement d’épandage de lisiers, rénovation de bâtiments pour améliorer les conditions d’accueil des animaux « Le problème est cependant que seules les grandes exploitations peuvent faire ces gros investissements, pointe Jean-Louis Peyraud, alors même que l’on prône des exploitations plus petites dans le non-intensif. » Pour ces deux spécialistes, le rôle des collectivités territoriales, dont la Région, mais également les filières et les coopératives, s’avère dès lors crucial pour organiser cette complémentarité à l’échelle des territoires, réfléchir à des rémunérations incitatives versées aux éleveurs « pour services environnementaux » et soutenir les petits exploitants ou ceux ayant les revenus les plus faibles.

 

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