Près de huit Français sur dix (78%) jugent la situation institutionnelle actuelle « grave », manifestant une défiance de plus en plus importante envers la politique et ses acteurs, selon le baromètre annuel du Cevipof sur la confiance politique.
Publiée ce mardi 11 février dans Le Monde, cette étude est réalisée chaque année par le Centre d’études de la vie politique française dans trois pays, la France, l’Allemagne, l’Italie. S’ajoutent cette année pour la première fois, les Pays-Bas. Elle montre en 2024 une aggravation de la défiance des citoyens envers leurs dirigeants et envers la démocratie en général.
Après la dissolution de l’Assemblée nationale en juin, seul un tiers des Français juge légitime le gouvernement actuel. Plus globalement, les sondés ne sont que 52% à penser que les élections « peuvent changer les choses ». De fait, 71% disent que la démocratie ne fonctionne pas bien (+3 points), même s’ils continuent de plébisciter ce système de gouvernance à 80% (-3 points) par rapport à tout autre. De manière générale, seuls 26% des Français déclarent avoir confiance dans la politique (contre 47% en Allemagne et 39% en Italie). A contrario, 37% expriment de la méfiance à l’égard de la politique, 26% du dégoût (+7 points) et 6% seulement de l’espoir. Et s’ils continuent à s’intéresser à la politique (55% assez ou beaucoup), ils n’ont pas confiance dans les partis (16%, tout en bas du tableau des organisations). Plus de huit personnes interrogées sur dix (83%, +2) estiment notamment que les responsables politiques ne tiennent pas compte de leur situation et les trois-quarts (74%, +6) qu’ils sont corrompus.
« La confiance dans l’Assemblée nationale atteint un niveau historiquement bas, avec 24%, soit un retour à son niveau de décembre 2018, au plus fort de la crise des Gilets jaunes, constate le Cevipof. Comparativement, le Sénat fait mieux avec 32%.
C’est clairement le niveau local qui enregistre le taux de confiance le plus élevé, comme cela est souvent constaté dans ce type de sondages. 58% de confiance pour le conseil municipal (avec toutefois seulement 8% de « très », les 50% restants étant du « plutôt »), 50% pour le conseil départemental et 49% pour le conseil régional.
Lorsque sont évoquées non plus les « institutions » mais les « personnalités politiques », on retrouve à peu près les mêmes scores : 61% de confiance à l’égard du maire (dont 14% de « très »), 48% pour le conseiller départemental et 46% pour le conseiller régional.
Un paradoxe ? Interrogés sur les détenteurs du « vrai pouvoir » au-delà de l’Etat, les sondés citent, dans l’ordre, « les marchés financiers » (31%), l’Europe (18%), les citoyens (15%), les Gafam (12%), les grandes entreprises (12%), les juges (3%), les réseaux sociaux (3%)… et ne sont que 2% à évoquer les collectivités locales.
Interrogés plus généralement sur leur état d’esprit actuel, les Français expriment au premier chef des sentiments de méfiance (45%, +7), de lassitude (40%, +4) et de morosité (30%, +4). 36% reconnaissent se sentir « seul » dans leur vie. Et pourtant, 53% estiment avoir « une liberté et un contrôle total » sur leur avenir. Autre note plutôt positive : 47% estiment avoir une situation meilleure que celle de leurs parents au même âge, contre 29% évoquant une situation « pire » (14% de sans réponse).