Lors du 16e Congrès des Régions le 19 octobre 2020 à Saint-Ouen, Renaud Muselier a lu une déclaration solennelle des présidentes et des présidents des Régions de France à la suite de l’assassinat de Samuel Paty à la sortie de son collège, vendredi dernier à Conflans-Sainte-Honorine.
Le président de Régions de France a lu cette déclaration en présence de Christine Lagarde, Présidente de la Banque centrale européenne, Gérard Larcher, Président du Sénat, François Baroin, président de l’AMF, Dominique Bussereau, président de l’ADF, et des Présidents de Région. Tous ont ensuite observé une minute de silence à la mémoire de Samuel Paty.
Le texte de la déclaration solennelle
« L’assassinat ignoble et lâche de Samuel Paty, enseignant dans un collège des Yvelines, vendredi 16 octobre a soulevé une immense émotion dans notre pays. Cette émotion est à la hauteur des symboles de la République qui ont été atteints.
« Car ce qui a été visé, c’est un double symbole : la liberté d’expression d’une part et l’école de la République d’autre part.
« Or, l’école républicaine a pour rôle fondamental d’amener nos enfants à être des citoyens libres. La liberté est un droit, mais l’école leur enseigne qu’elle est aussi un devoir. Le devoir de respecter la liberté des autres, de respecter les libertés fondamentales, dont la liberté d’opinion et la liberté de la presse.
« L’école républicaine enseigne aussi à nos enfants que la République est laïque. L’État n’exerce aucun pouvoir religieux et les églises n’exercent aucun pouvoir politique. L’école de la République combat ainsi les fanatismes, elle lutte contre l’obscurantisme, elle lutte contre la corruption de toute forme de religion. Elle construit des citoyens émancipés qui doivent pouvoir juger de toute chose en libre conscience.
« L’école de la République, enfin, enseigne à nos enfants que l’État de droit garantit l’équilibre entre les individus vivant en société et assure la paix civile.
« Tous les jours, inlassablement, l’école de la République inculque ainsi à nos enfants le socle de notre idéal républicain.
« Mais cinq ans après les attentats de Charlie Hebdo, le fait que l’auteur d’un acte aussi lâche et barbare n’ait que 18 ans en dit long sur le chemin qui reste à parcourir. Il montre à quel point la mission fondamentale de l’école de la République devient chaque jour plus ardue dans un monde dont les convulsions brouillent les fondements démocratiques.
« La loi, la justice et l’ordre sont plus que jamais indispensables pour combattre sans répit ces dérives intolérables. Mais avant tout, c’est aux consciences qu’il faut s’adresser pour que les délires obscurantistes ne trouvent plus de prise. C’est le rôle que la nation a confié aux enseignants qui font vivre l’école de la République.
« Nous, présidentes et présidents des Régions de France, solennellement, apportons tout notre soutien à celles et ceux qui exercent au quotidien et avec passion le métier difficile d’accompagner nos enfants vers l’âge adulte dans les valeurs de la République. Nous leur disons que nous ne laisserons jamais qui que ce soit les intimider dans cette tâche fondamentale. Nous leur disons notre immense respect. Nous leur disons notre fierté pour le rôle qu’ils jouent dans la cohésion de notre nation.
« Nous, présidentes et présidents des Régions de France, en charge des lycées, voulons contribuer à l’affirmation du rôle fondateur de l’école comme ciment de la République.
« Nous, présidentes et présidents des Régions de France, responsables politiques, affirmons que la caricature est une composante fondamentale de la liberté d’expression. Le délit de blasphème n’existe pas, et dès lors qu’il s’agit d’humour, notre droit protège l’outrance et la parodie.
« C’est pourquoi, nous, présidentes et présidents des Régions de France, prenons aujourd’hui l’initiative de préparer la publication d’un ouvrage rassemblant les caricatures religieuses et politiques les plus marquantes parues dans les quotidiens de la presse régionale, aux côtés de celles qui sont parues dans la presse nationale.
« Nous allons demander à un collège d’historiens d’y remettre en perspective le droit à la caricature dans l’histoire politique de notre pays. Le fait qu’y coexistent depuis longtemps des caricatures concernant toutes les religions et des caricatures politiques est la preuve la plus vivante de la laïcité de notre République. Nous associerons le ministère de l’Éducation nationale à cette initiative pour que cet ouvrage puisse être mis à la disposition de tous les lycéennes et lycéens de France.
« Par ce geste, dans le respect de nos compétences, nous voulons témoigner de notre engagement à défendre les valeurs de la République et le droit fondamental de chacune et chacun de nos concitoyens à vivre en paix et dans la liberté. »