4 novembre 2016

Atelier Transports et mobilités, de nouvelles responsabilités pour les Régions

transports, mobilité, Régions, France, congrès, atelierLa loi NOTRe constitue une mini-révolution dans le monde des transports. Le transfert des transports interurbains et scolaires est un immense chantier mené par les Régions avec les Départements. Alors que les Régions deviendront pleinement compétentes sur les lignes d’autocars interurbaines à partir du 1er janvier 2017, et quelques mois plus tard sur le transport scolaire, cet atelier du Congrès de Régions de France (29 septembre 2016 à Reims) a été l’occasion de faire le point sur les stratégies des Régions, l’avancement de la mise en œuvre des transferts, et le retour des acteurs du terrain.

Tous les intervenants ont souligné le bon déroulement des négociations préalables aux transferts de compétences, avec, pour objectif, la bonne tenue de la prochaine rentrée scolaire. D’un point de vue opérationnel, l’enjeu principal est d’assurer une continuité des services en lien avec les autorités organisatrices de proximité, au plus proche des usagers, des territoires et des emplois.

Les Régions auront la responsabilité d’apporter de nouvelles solutions aux besoins de mobilités sur les territoires. Il n’y aura pas une réponse unique, mais une palette de solutions à développer, en fonction des territoires, dont les frontières des intercommunalités sont amenées à évoluer, et en fonction des besoins spécifiques, notamment auprès des scolaires, en matière de sécurité et d’accompagnement. Elles pourront à ce titre s’appuyer sur l’expertise des autorités organisatrices de proximité et de l’ANATEEP. Les Régions auront ainsi la chance historique de pouvoir ouvrir une période de dialogue avec tous les acteurs pour identifier les besoins et solutions de mobilités à apporter, et d’y répondre en maîtrisant toute la chaîne de mobilités à destination des usagers.

Trois cent cinquante participants ont assisté au débat auquel sont intervenus :

Quel état des lieux des transferts des compétences transports des Départements aux Régions ?

Michel Neugnot a rappelé les principales orientations de la loi NOTRe. Elle « donne compétence en matière de mobilité entre deux niveaux d’autorités organisatrices : les agglomérations pour les mobilités urbaines et les Régions pour les transports interurbains ». Les Régions auront la responsabilité des transports non urbains de personnes et des transports scolaires en dehors des agglomérations. Les Régions se retrouveront également dans « un système de solution de mobilité où elles auront pour objectif de répondre aux besoins de mobilité des concitoyens », et disposeront d’outils prescriptifs pour planifier l’organisation de ces mobilités.

Pour Philippe Adnot, le transfert de compétences du Département de l’Aube à la Région Grand Est s’effectue de manière exemplaire. « Le travail d’analyse, de compréhension, d’échanges et de partage des conséquences de la loi NOTRe a été anticipé et est très avancé ». L’enjeu pour le Département est « d’assurer une continuité du service pour les transports scolaires », qui représentent pour le Département un budget de 14 millions d’euros, auquel participent également financièrement les familles, et de « garantir l’harmonisation statutaire des personnels des Départements ». Il restera à la Région de négocier durant l’année 2017 les enjeux liés à l’évolution de la carte intercommunale : « les intercommunalités qui s’agrandissent attendront un an, comme le prévoit la loi, pour récupérer la compétence des transports scolaires sur leurs territoires élargis ».

Nicole Bonnefoy a présenté l’ANATEEP, qui, « reconnue comme association d’aide complémentaire aux objectifs de sécurité routière, a pour objectif de contribuer à la qualité et à la sécurité des transports scolaire ». Au regard des remontées de terrain des 700 organisateurs de transport scolaire fédérés par l’association, l’ANATEEP pressent « de bonnes relations entre les Régions et les Départements pour s’organiser en cohérence pour réussir les transferts, avec l’obsession et la volonté de ne prendre aucun risque, et en ce sens de maintenir l’existant. Il n’y aura donc pas de big-bang au 1er septembre 2017 ». Toutefois, l’ANATEEP attend encore aujourd’hui des Régions une plus importante lisibilité sur la volonté des Régions de continuer de travailler avec les autorités organisatrices de proximité, au plus près des familles. « Cette inquiétude est également partagée par les PME des entreprises de transports départementaux, qui craignent une concentration des opérateurs du secteur lors des renouvellements des marchés ». Il s’agirait donc de maintenir des principes d’allotissement pour préserver l’économie sur le territoire.

Sur ce sujet, Paul de Rosen rappelle que l’objectif prioritaire de Transdev est « d’exécuter la vision des élus, leur donner confiance, afin que leurs choix soient effectivement réalisables aux standards de qualité et de performance voulus. Il s’agit de faire en sorte que l’intégration de ces compétences se passe au mieux pour que la rentrée scolaire 2017 soit une réussite ». L’opérateur attend donc une continuité juridique des contrats, ainsi qu’une continuité du parcours client : « il faut que les parcours client prennent en compte une offre de transports qui soit étendue : des dispositifs d’écoute, d’osculation des parcours clients pour les rendre efficaces ». La continuité s’exprime aussi en termes d’emplois, « Transdev ayant une présence locale via des filiales locales et des emplois locaux ».

Quelles solutions de mobilité pour les territoires ?

L’objectif de la seconde séquence était d’identifier les besoins de mobilité des territoires et les solutions innovantes que peuvent mettre en œuvre les Régions. Paul de Rosen a rappelé l’obsession de Transdev de, « comme les Régions, comme les Départements, trouver les meilleures solutions de mobilité qui vont s’adapter aux besoins de mobilités renouvelés. Un des critères de réussite de la réforme territoriale sera de trouver tous ensemble des solutions pour répondre aux besoins de mobilité des territoires enclavés ». A ce titre, Philippe Adnot a ajouté « qu’il n’y a pas une réponse, mais qu’il il y a bien une palette de solutions que l’on doit pouvoir adapter en fonction des endroits et des circonstances ».

De telles ambitions nécessiteront de mobiliser « l’ensemble des modes, les modes lourds conventionnels, mais également des alternatives comme l’usage partagé des véhicules individuels. Ce type d’intermodalité permet de trouver des solutions de mobilité dans les zones enclavées où l’on en a le plus besoin », souligne Paul de Rosen. Sur ce point, Philippe Adnot confirme que « les intercommunalités vont devoir se transformer lorsqu’il va falloir desservir des territoires ruraux de plus en plus excentrés ». Dans le cas de l’Aube, Philippe Adnot précise ainsi que « dans les intercommunalités ayant demandé de faire du TAD, le Département a transféré la compétence à l’intercommunalité. Les lignes interurbaines sont dans ce cadre à la charge des intercommunalités, hors financement des parts relatives aux transports scolaires ».

Avant de parler de solutions de mobilité, Nicole Bonnefoy a rappelé que, « toute l’histoire du transport scolaire montre que ce sont d’abord les besoins qui créent l’offre de transport scolaire ». Pour l’ANATEEP, les décisions impulsées par l’Etat sur la carte scolaire, les rythmes scolaires ont des conséquences non négligeables en termes d’organisation et de coût des transports scolaires. « Les Régions devront, dès à présent, prévoir un lien privilégié et de proximité avec l’Education Nationale », précise Nicole Bonnefoy. En effet, la qualité et l’efficience des transports a également un impact positif sur l’attention des élèves et leur réussite scolaire. Enfin, les Régions devront également prendre en compte toutes les exigences de sécurité des enfants transportés, et « éduquer les jeunes à la sécurité et à la citoyenneté ». L’ANATEEP a dans ce cadre sensibilisé près de 210 000 élèves en 2015 grâce à son réseau de fédérations locales.

Quels enjeux mettre en perspective auprès des Régions suite à la loi NOTRe ?

Pour conclure l’atelier, la dernière séquence a permis de mettre en perspective les enjeux de la réforme territoriale, au regard des conditions des transferts et des solutions de mobilité précédemment identifiées. Pour Nicole Bonnefoy, « après la délicate question du transfert, l’enjeu majeur, c’est la capacité pour les Régions de trouver le bon niveau de délégation des transports scolaires, en s’appuyant sur les intercommunalités et la proximité. La loi NOTRe est une opportunité de renforcer cette proximité, à condition de cadrer ces éléments au travers d’une politique régionale ». Les autorités organisatrices de proximité auront ainsi en charge la compétence d’assurer la relation avec les usagers, les familles, et d’appliquer les mesures de sécurité et d’accompagnement des scolaires. Selon l’ANATEEP, les Régions auront, au regard de leur statut d’autorité organisatrice de premier rang, de lourdes responsabilités juridiques et pénales qu’elles ne pourront pas déléguer à leurs organisateurs de proximité : « l’ANATEEP sera à disposition des Régions pour les accompagner dans cette montée en compétence ».

La recherche du bon niveau d’articulation entre la Région et les autorités organisatrices de proximité est également un sujet partagé par Philippe Adnot : « en partageant bien les responsabilités de chacun, l’objectif est d’avoir de l’efficacité, de la souplesse, et de diminuer les doublons de contrats et de conventions ». Les agglomérations, telle que Troyes, devront également faire face à l’extension de leurs périmètres, et s’organiser en conséquence pour la reprise d’ici un an de la compétence.

Enfin, Transdev rappelle également les enjeux du numérique. « Il faut également prendre en compte l’évolution du comportement des usagers, dont le digital va révolutionner les comportements clients », souligne Paul de Rosen. 80% des voyageurs des lignes interurbaines, y compris scolaires, ont un smartphone, et les deux tiers souhaitent utiliser cette capacité digitale pour faire des transports un moment utile et agréable. « Les transports ont un rôle de « connecteurs », tant d’un point de vue digital, physique – au sein des gares et pôles d’échanges –, qu’humain. Les conducteurs et les agents qui sont au contact des clients et des citoyens, et qui doivent être formés pour concevoir leur mission dans le sens d’un trajet de bout en bout, doivent être autant connectés que leurs clients », précise Paul de Rosen.

Une chance historique

En conclusion, Michel Neugnot a rappelé l’importance de la concertation à venir, qui doit réunir tous les acteurs. « Il s’agit d’une période de dialogue nécessaire avec tous les acteurs qui doivent se saisir de ce processus d’élaboration pour avoir un débat à tous les niveaux sur ce que l’on veut comme type de réponse de mobilité à nos concitoyens. Cela passe par un état des lieux et un arbitrage fort à porter par les Régions ».

Pour Michel Neugnot, « les Régions ont la chance historique de reposer ces questions et réponses de mobilité par un alignement des planètes, de la réforme territoriale, de la réforme ferroviaire, aux engagements Etats-Régions du 27 juin 2016 ». Les Régions pourront « privilégier les chaînes de mobilité par de nouveaux outils, également via le numérique ». Elles seront également en mesure « d’apporter une meilleure lisibilité des tarifs, notamment grâce à la pleine liberté tarifaire obtenue par les Régions, pour concevoir une politique de prix différente pour amener, vers les transports en commun et des solutions de mobilité novatrices, plus de population ».

Partager cet article :

About emmanuel georges picot

  • Email