samedi 03 juin 2023
11 janvier 2018

La Région au coeur du nouveau service public de la performance énergétique de l’habitat

Un rapport cosigné par Michel Piron, ancien député du Maine-et-Loire, et par Benoît Faucheux, président de la Commission Développement durable et Transition énergétique de Régions de France, précise les contours et l’organisation du service public de la performance énergétique de l’habitat (SPPEH), le rôle des collectivités territoriales et les modalités de financement. Les propositions de ce rapport vont alimenter le plan rénovation énergétique du gouvernement, en cours de consultation, et tout particulièrement son volet territorial à construire.

Le SPPEH est inscrit dans la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Toutefois, celle-ci ne précise pas certains points cruciaux quant à sa mise en œuvre. D’où la mission confiée le 25 octobre 2016 à Michel Piron et Benoît Faucheux par les présidents de Régions de France et du Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique (CSCEE). La mission consistait notamment à identifier les difficultés rencontrées jusqu’ici et les facteurs de réussite, ainsi qu’à préciser le socle des missions du service public et son interface avec la filière professionnelle du bâtiment.

Pour la mission, le SPPEH doit s’entendre comme l’ensemble des actions publiques (Etat, collectivités et leurs opérateurs publics, dont les plateformes territoriales de la rénovation énergétique – PTRE) concourant à la rénovation énergétique de l’habitat.

Faciliter le parcours du particulier

L’enjeu global est de faciliter le parcours de rénovation du particulier, depuis le premier contact jusqu’à l’achèvement des travaux voire au-delà. Pour cela il est nécessaire de clarifier les différentes étapes de ce parcours et les missions à réaliser pour répondre aux besoins du particulier, en se posant la question à chaque fois de ce qui relève du public et ce qui relève du privé. La notion même de PTRE doit également être clarifiée, sachant qu’elle est actuellement utilisée pour désigner tantôt les points rénovation info service (PRIS), tantôt les plateformes financées par l’Ademe suite aux appels à manifestations d’intérêt lancés avec les Régions.

La mission propose donc un certain nombre de définitions, établies en concertation avec l’Ademe et l’Anah. Le rapport distingue trois blocs de mission concourant au déclenchement de travaux :

  • accueil/information/conseil;
  • en amont : repérage/identification/prise de contact pour cibler les bâtis et publics prioritaires à partir des données disponibles puis prendre contact sans attendre que le particulier se manifeste;
  • en aval : accompagnement. Lorsque, sur la base des informations et conseils gratuits qu’il a pu obtenir, le particulier ne se sent pas en mesure de contractualiser directement avec une ou plusieurs entreprises, l’accompagnement consiste à lui apporter une aide pour préciser son projet, sélectionner les entreprises compétentes, définir son plan de financement et le cas échéant obtenir un emprunt adapté, puis si nécessaire suivre et réceptionner les travaux, voire prendre en main le logement rénové, adapter ses usages et mesurer ses économies d’énergie.

Pour la mission, cet accompagnement relève de l’offre privée concurrentielle. La collectivité peut choisir d’offrir ce service sous la forme d’un service public rémunéré, assuré en régie ou par délégation de service public, dès lors que les modalités de rémunération du service n’induisent pas de distorsion de concurrence avec l’offre privée. L’action publique doit néanmoins se concentrer sur l’émergence d’une offre adaptée de travaux et d’accompagnement (y compris financier).

Une mission globale d’animation pour la Région

Pour assurer cette cohérence d’ensemble du SPPEH et sa mise en œuvre effective sur les territoires, la mission propose de reconnaître aux Régions une mission globale d’animation de la rénovation énergétique des bâtiments, compte tenu de leur rôle de chef de file, de leurs compétences en matière de formation, de développement économique, de planification (SRADDET et élaboration du programme régional pour l’efficacité énergétique – PREE), et des initiatives qu’elles ont déjà prises.

Les EPCI, qui jouent un rôle similaire à leur échelle en matière de planification et de mise en œuvre des politiques air-énergie-climat, (cf. les PCAET) sont des partenaires privilégiés de la Région. Les Départements devront être associés aux initiatives des Régions et EPCI, notamment au titre de leur contribution à la résorption de la précarité énergétique et à l’accessibilité des services au public, de leur rôle de chef de file en ce qui concerne l’autonomie des personnes ou encore pour la participation des ADIL (agences départementales d’information pour le logement) et CAUE (conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement) au service public. De même, les Communes devront être associées au titre de leurs compétences propres et de leur proximité avec les particuliers.

Un réseau unique couvrant tout le territoire

S’agissant des missions d’accueil/information/conseil, , le rapport préconise la création d’un guichet unique pour que l’ensemble des publics d’un territoire donné, quelque soit leur niveau de ressources, puissent trouver au sein de la même PTRE l’ensemble des informations sur la rénovation énergétique de leur logement. Pour ce faire, l’ensemble des PRIS actuels (ANAH ou non) devront être regroupés en un réseau unique de PTRE couvrant tout le territoire.

Ce regroupement sera piloté par la Région, en concertation avec les acteurs du territoire, dans le cadre du PREE et plus précisément du plan de déploiement des futures PTRE prévu par la loi, qui sera établi sur la base d’un diagnostic de l’existant. Le regroupement doit aussi, autant que possible, élargir l’information et le conseil à l’amélioration du logement, afin de susciter davantage de travaux de rénovation à l’occasion desquels la performance énergétique pourra être améliorée.

En lien avec les têtes de réseau national (Ademe, Anah, Anil), les Régions devront, sans attendre, organiser un travail en réseau des PRIS/PTRE afin de partager les expériences et de mutualiser les outils numériques, et mettre en place des observatoires régionaux de la rénovation.

La mission préconise par ailleurs que les Régions organisent l’animation des professionnels à leur échelle, afin notamment de développer des offres globales en direction des particuliers.  En lien avec les dispositifs nationaux, les fédérations professionnelles, les chambres des métiers et de l’artisanat et les chambres de commerce et d’industrie, les centres de ressources du réseau BEEP, les Régions pourront choisir librement de s’appuyer sur des collectivités infrarégionales ou PTRE, notamment pour structurer l’offre dans le cadre d’opérations territorialisées.

La Région tiers de confiance

La Région et les collectivités partenaires jouent également un rôle de « tiers de confiance » vis-à-vis de l’offre privée, avec l’aide des PTRE, et organisent la communication régionale, sous la bannière définie au niveau national. Elles font connaître les entreprises RGE ; l’État les associe à l’amélioration de ce dispositif.

A travers son PREE, la Région doit élaborer puis mettre en œuvre une stratégie globale incluant également:

  • un volet financement : il s’agit de veiller à la bonne articulation des aides, et d’aider les particuliers à obtenir des prêts ou avances pour financer leurs travaux de rénovation énergétique, en associant le secteur bancaire à la démarche. L’action publique peut typiquement s’orienter vers un rôle de « tiers-certificateur » vis-à-vis des banques, voire de « tiers-financeur » par la création de société de tiers-financement ;
  • l’incitation à une rénovation performante : à travers les aides et avances éventuelles (ex : pour financer un audit énergétique, ou atteindre un niveau de performance plus élevé que celui requis par les aides nationales), mais aussi plus largement en s’assurant que chaque étape de travaux s’inscrit bien dans la perspective in fine du niveau BBC rénovation (« BBC par étapes »).

Une ressource fiscale pour les Régions

Affecter une ressource fiscale, dynamique et pérenne permettrait aux Régions de remplir leur mission d’animation globale du territoire en faveur de la massification de la rénovation énergétique des bâtiments, et également de reprendre à leur charge la part du fonctionnement des PRIS & PTRE-AMI actuellement financée par l’Ademe dans la contractualisation avec les EPCI et/ou Départements.

Régions de France défend à ce titre la territorialisation d’une partie de la Contribution Climat Énergie (CCE) au bénéfice des EPCI (10€ par habitant) et des Régions (5€ par habitant). Celle-ci financerait plus globalement les actions nécessaires pour atteindre les objectifs fixés dans leurs documents de planification climat-air-énergie (SRCAE ou SRADDET).

Enfin, pour la mise en œuvre de l’ensemble de ses propositions, la mission identifie les chantiers à mener, à commencer par l’établissement d’un cahier des charges national du SPPEH par l’État et les Régions. Elle propose de rechercher une gouvernance territoriale partagée de la rénovation énergétique des logements à travers un partenariat étroit entre la Région, l’État et la direction régionale de l’Ademe.

 

PDF rapport SPPEH final

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1 Commentaires

  • steeve
    mardi 16 janvier 2018 - 14h05

    Intéressant comme conclusion, mais les régions vont devoir recruter du personnel pour réaliser l'ensemble de ces missions ! Actuellement beaucoup trop de personnel administratif sans compétence technique, cela risque d’être problématique pour assurer une réel animation de la rénovation énergétique des bâtiments (animation du réseau des PRIS + réseau des professionnels). et je me demande comment les PRIS Anah vont être territorialisé ? ils sont surtout dans les DDT et les ADIL, donc pas dans des EPCI.

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